continents découverts (trop?) tard:

Celan (dans la Baignoire, ce 3/2/2015, nuit) — et ouvrir le monde, travail de ce Poète, écriture datant de ma rentrée au collège, j’avais douze ans Wernher, le professeur d’anglais, a hurlé pendant un cours que, feignant ignorer l’alsacien, nous étions des saboteurs.

J’avais douze ans Paul Celan écrivait j’ignorais absolument tout ce qu’il savait je croirais encore longtemps que les prophéties de Kafka étaient grotesques d’un cerveau dérangé. Pourtant, au collège du lycée Kléber en voyant Monsieur Erwin Wernher hurler, j’aurais dû savoir que c’était un cousinage d’avec les savoirs atroces et irrespirables de Paul Cela. Mais je ne découvrirais Paul Celan que mille ans plus tard, pas en 1968;mais en 2005, je ne savais pas que Monsieur Wernher réitérait, ainsi, pour nous petits moitards, les colères Sturm und Drang de Salzmann, Goethe, Herder, Lenz, Büchner, quand ils considéraient un affadissement du penser germanique par le mélange au français.

Bien plus tard Wernher devait me raconter sa nuit de cristal, pas loin D’Offenburg. C’était longtemps après. Après mon bac. On était presque devenus potes. Lui presque mon père, son piano, son jazz, ses formules à l’emporte-pièce, ses paradoxes, son regard vertigineux sur la banalité, sa jouissance et son attente bientôt couronné de succès d’une femme jeune et désirable.

Mais étrangement il ne nous parla jamais, pendant cette année 1968, du mythe solaire de la Révolution.

L’Alsace, dans son essence allemande, ne mesure pas quel drame constitue, en France aristocratique, en France soumise, la pérennité d’une division sociale caduque mais toujours humiliante pour le peuple,(tous ces châteaux de l’aristocratie sûre de sa joie, fière de son bon goût, ivre du sang des pauvres, juchée, dans les villages et les bourgs, toutes ces âmes concussionnaires qui s’en sont faites, depuis Napoléon, les héritières dans les partis et les organisations — même les plus philanthropiques- du politique) le France soumise ignorant encore aujourd’hui en 1968, encore aujourd’hui en 2005, encore aujourd’hui en 2023, qu’en Allemagne il en aille structurellement autrement – et que les prussiens, les bavarois, les saxons, les rhénans… n’ont jamais attendu l’Autre Monde pour trouver une égalité entre le maître et l’esclave 

— on ne mesure en France que la caricature de ça, l’Adolf, qui hisse le populisme planétaire aux hauteurs qu’il n’a plus perdu depuis.

Ploucs milliardaires sculptant la pensée des masses jusqu’à ce qu’elles leur offrent les ventres si tendres de leur démographie. Adolf grimace derrière toutes les démagogies d’aujourd’hui, trépigne de joie comme il savait si bien faire chaque fois qu’un tyran flatte le Sang, la Race, la Tribu, la Seule Religion Vraie, le Drapeau… Il en caresse de joie sa chienne blondie… s’il savait combien d’Hitlers tiennent leur pouvoir encore plus fermement qu’un berger allemand maintenant, grâce au contrôle absolu que leur a progressivement permis l’invention de l’internet…

Jacques Calot, les malheurs de la Guerre.

Au mythe solaire de la Révolution se chauffèrent pourtant les écoliers de Thübingen.

L’intérêt pour le panthéisme, l’ultime bouée des bourgeois du 18° siècle, devant leur réception de l’archéologie, des premières traductions des hiéroglyphes… Lentement et terriblement l’archéologie faisait fondre comme un sucre les patchworks historiques constitutifs des effigies sacrées d’une nation qui s’était plue cartésienne. Le roi, dieu, les aristocrates, le chic des châteaux, la preuve par neuf de leur savoir-vivre opposée à la mécréance des ploucs démontrée par la malséante dès leur vie inconfortable.
Tout ça sans leur faire perdre, en France, une once de leur sacré pouvoir face au désespoir des masses du soufflé démographique.
Dieu, cocotte minute pour faire cuire un monde qui a perdu toute générosité sous le regard plein de larmes des femmes aux pieds nus.

Enfers. Hyeronimus Bosch, Lisbòa.

Evidemment, avant de connaître L’abbé Messlier des Ardennes, et son testament athée rédigé en cachette des paroissiens qu’il entretint dans leurs pieuses naïvetés toute une vie d’abbé durant, j’ai pensé que Spinoza avait à Amsterdam ouvert le bal du démantèlement des soutènements syncrétiques des grandes fois qui constituaient les guerres de religion, et le ciment de la société amsteldamoise, comme elles continuent aujourd’hui de constituer les contingents des fous mystiques qui défendent à leur insu l’argent du gaz, du pétrole, les banques de leurs pharaons qu’ils prennent pour les bienfaiteurs de leurs églises, de leurs synagogues, de leurs mosquées ou de leurs temples.

Et ce quatorze Juillet deux mil seize au matin le chauffeur d’un Camion frigorifiant sur la promenade des anglais s’est pris pour un pilote de Messerschmidt.

Écoutait-il de la musique comme Adolf ?

Avait-il déjà égorgé du monde avant comme les druides gaulois ?

Siècle des pieds-nickelés, victoire des cons, triomphe des niais, siècle machinal, du Zeppelin à la centrale nucléaire, Cocotte-Minute prête à se soumettre à la grande Cocotte-Minute de l’écrit iohannique, pour révéler le monde apocalyptique à soi-même au nom, toujours, d’un Roman qui organiserait le Chaos, au nom d’un dieu pratique, d’un Internet trop pratique, qui se soumet aux machines pour permettre aux technos-enfants de jouer les arbitres du match romanesque des piétés.

Les vérités de l’Abbé Meslay et de Spinoza n’ont éteint aucun incendie et pour cause: la démographie a besoin d’un roman pour refléter la fidélité au Père de toutes ces femmes aux pieds nus ou en perruques ou en robe bleue, de toutes ces pauvrettes offrant leur ventre à leur dieu intérieur de Justice. Leur coeur est à papa.

Les guerriers qu’elles enfantent abrutis de douleur chantent leur manque-à-jouir et se contrefoutent de l’austère pensée des savants.

Peu importe le flacon du réel tant qu’on a l’ivresse de l’imaginaire, la folie voit, les yeux fermés,la taille réelle du spectre terrible d’Hamlet-Machine.

La conférence de Wannsee continue de tenir son petit souper dans tous les lieux de culte.

Tous les lieux de culte sont avides d’établir l’équation, qui répondrait à l’avidité banquière d’une solution finale pour établir le triomphe sur tous de la pensée d’Un seul, celui qui finance le Culte — ah les moustaches d’Adolf et de Staline, ah le sourire d’Ubu-roi, ah les poèmes de Celan, ah le Requiem de Mozart, ah le corps supplicié des aimants et des aimés, ah chaque anniversaire de chaque malheur accroît la joie handicapée amoureusement, des bourreaux œdipiens.