Y reste les photos de mon frère

Y rest, pour l’actu, les photos que mon frère m’a expédié cette nuit d’Paname. Mais il sortait de la librairie Tschann et moi, moi en grève de tout éditeur et de tout libraire mes seuls écrits, dont comme tout papy perdu Robinson sur son propre blog je serai jusqu’à mon dernier souffle le seul lecteur, ils sont dans la précarité virtuelle de cet hébergement fosse commune remblai d’une impossible barricade je suis le seul émeutier de mon propre silence la librairie Tschann m’apparaît comme le rempart immarscessible de vrais vrais de vrais, et comme il y a grève à la radio, je lis Victor Hugo les misérables, vieux papy blogueur qui dans cinq minutes puisque c’est l’aube, repart voir ses gentils patients qui lui pardonnent en plus (pas tous, rétrospectivement y en a un qui voulait me défoncer ) en ce moment d’être plus préoccupé par les barbelés que représente pour sa journée de petit médecin généraliste du coin de la rue, un nouveau logiciel médical, hébergé comme mon blog par la fausse Commune du blog – et rempli de complexités effarantes lorsqu’on doit s’occuper du monsieur qui fait un infarctus devant soi alors que le logiciel ne permet pas de bien faire la lettre pour les urgentistes voilà

Hier soir un des écrivains qui peuplent ma bibliothèque, Georges, Georges Didi Huberman, savait il qu’il prenait la parole sous les enluminures du Londinio-Cherbourguo-Lorrain (infiniment mittel europien) Philippe Haag ?

je vois sur la photo envoyée aussi par mon frère, ces dessins merveilleux de Philippe Haag, suspendus derrière un des plus actifs remueurs de ma pensée et les radios sont en panne – les radios sont en panne ce 23/3/23, je ne peux pas même savoir si et comment la guerre et les guerres continuent de tendre leurs lacets pétroliers autour de mon destin dans le quartier classé par l’Unesco des grandes avenues teutoniques de Strassburg où dans quelques secondes je dois sauter sur mon vélo pour arriver avant les malades pour essayer de pallier avant leur cohorte les complexités aristotéliciennes de mon nouveau logiciel – sans savoir si des missiles balistiques sophistiqués ne vont pas venir se planter dans mon thorax pendant que je pédalerai au milieu d’un printemps charmant — pourtant trotz Allerdem tout refleurit et Didi Hubermann parlait hier soir, devant les dessins du Lorrain des lorrains, un savant éperdu de perspectives d’océans et d’arbres et connaisseur, lui, d’une anthologie des images (chaque fois qu’ensemble nous traversons les musées et les œuvres contemporaines il édicte nom après nom les auteurs de ce qui l’effare de jouissances picturiesques.

chez moi je remarquais ce matin trois tableaux chacun d’un•e ami•e

A gauche le compte rendu d’un retour historique chez elle après soirée, d’une amie qui aurait dû vraiment être exposée ailleurs que sur mon blog et à droite la Géorgie par un autre Georges, Georges Pasquier d’la télé et la radio toujours muette ce 23/3/23

Mais si les murs sont offert au regard solitaire de celui qui file soigner (qui est au menu ce matin des gens qui me regardent avec compassion me noyer dans mon logiciel ? Ah si seulement je mourais sous leurs yeux quel mort triomphale ce serait enfin du Poquelin !)

Et donc celui qui m’a parlé dans ses écrits des fluidités de la toge des nymphes (Nympha Fluida) celui qui m’a offert de lire en outre et avec précision le peu d’images échappées des camps (Mémoire des Camps) et faire son anthologie serait infinie, il était hier soir sans le savoir peut-être, en face de Philippe dont les dessins décoraient la librairie.

On voit bien à son sourire qu’il est suspendu par son œuvre

… et c’est le silence des radios et moi je lis Les Misérables pendant que se tait la radio je lis les raisonnements de Victor Hugo tentant de discerner l’émeute de l’insurrection, et je me demande si le Bien est un drapeau ou si je vais le croiser en descendant dans deux secondes, prendre mon biclou, traverser le campus universitaire plein d’architectures (un coup d’œil-de-coté aux vieux platanes rangés comme les soldats casqués des casernes de la vieille Prusse qui étaient là avant les universités) et embrasser le monde en songeant à tous les amis qui parviennent à dresser une re-présentation du monde, depuis celles de la grotte Chauvet jusqu’aux douceurs colorées de mon frère – songeant à Michel Foucault et à Coluche qui ne sont plus là pour nous dire pourquoi les radios se taisent ce matin. Ah! S’adosser au Bien d’une représentation tangible et pas trancheuse, cela ferait il de moi un despote ?

Représenter l’ennemi (le nouveau logiciel médical qui me dit mon égarement et ma maladresse) dans ma grotte ce serait rendre au paysage la force qu’il y avait il y a trente cinq mille ans lors des aurochs et de la Femme de la Grotte Chauvet ? Femme lionne qui était dans mon lit cette nuit – hier, me semble-t-il, oui, hier, la grotte Chauvet chantait de toutes ses parois conservées pieusement par ceux qui y dessinaient. Trente cinq mille ans et les parois conservées pendant que le monde notre monde nos paysages détruits disparus les mammouths et moi et moi et moi. Vingt aïeux tout au plus me sépare des mille ans écoulés, deux cent tout au plus des dix mille, une toute petite troupe de six cent aïeux me séparent de la dessinatrice des mains de la grotte Chauvet mais où sont parties les neiges d’antan ?

Représenter l’objet qui m’empêche de savourer le regard de mes interlocuteurs et me contraint de prêter attention aux statistiques glacées de l’interconnexion des robots…

voyaient ils, ceux de la Grotte Chauvet, voyaient ils comme l’aïeul de mon frère, Haendel, une Providence dans chaque forme du monde ? voyaient ils une providence dans la forme des parois de cette grotte dont ils ont respecté chaque relief comme un donné prodigieux, comme cette arche naturelle de rochers, le Pont d’Arc, qui en marque l’être ? Respectait il le monde en le représentant sans intention de le troubler, comme mon frère représentant le GLASWALDSEE (lac de verre et des forêts , tout près d’ici dans le silence du Schwartzwald et la fuite des animaux d’ensauvagerie).

Ghislain, Glaswaldsee.